26 nov. 2021Effets indésirables rapportés sous statines

L’effet nocebo y est pour beaucoup

Un certain nombre d’effets indésirables chez les patients sous statines sont aussi perçus par des patients sous placebo et ne seraient par conséquent pas dus au médicament mais à l’effet nocebo, selon une étude publiée dans le Journal of the American College of Cardiology (JACC).

placebo and nocebo compared
iStock/kasezo

La plupart des personnes qui commencent un traitement par statinel’abandonnent, le plus souvent à cause des effets secondaires, principalement des mylagies, de la fatigue ou des crampes. Pourtant, plusieurs essais contrôlés contre placebo chez plus de 80 000participants n’ont pas trouvé de preuves tangibles d’une augmentation des symptômes sous statine vs placebo, rappellent James Howard, Imperial College London, et ses collègues dans l’introduction de leurétude.

Ils ont conduit une étude avec contrôle placebo pour évaluer la survenue et l’intensité des symptômes chez les patients qui avaient arrêté leur traitement par statine en raison d’effets indésirables qualifiés d’intolérables. Ils ont également mesuré l’effet nocebo (le rapport des symptômes induits par la prise de statine mais aussi par la prise d’un placebo).

Des résultats somme toute logiques

Dans l’essai SAMSON, 60patients (âge médian 65,5ans) ont reçu quatre flacons de comprimés de statine (20mg d’atorvastatine) correspondant à un mois de traitement chacun, quatre flacons de comprimés placebo, et quatre flacons vides.

Ils devaient utiliser ces flacons d’une manière randomisée spécifiée, à raison d’un par mois, sur une année. Ils devaient également déclarer l’intensité de leurs symptômes au quotidien sur une l’échelle de 1 à 100 (0, aucun symptôme ;100, symptômes intolérables). En cas de symptômes intolérables, ils pouvaient arrêter les comprimés assignés pour le mois en cours, mais devaient tout de même notifier leurs symptômes.

Au total, 49 participants sont allés au terme des 12mois et 11 jusqu’à 11mois (sept arrêts décidés par le patient et quatre par l’équipe soignante, principalement pour des effets secondaires sévères). Sixmois après la fin de l’étude, 59 patients ont participé au suivi supplémentaire.

L’intensité moyenne des symptômes indésirables était de 8 points pendant la période où le groupe ne recevait pas de traitement (période de flacons vides). En revanche, elle était aussi élevée pendant la période où le groupe prenait les statines (16,3points) que pendant la période sous placebo (15,4points).

Ce résultat montre qu’il n’y avait pas de différence statistiquement significative entre placebo et statine. La majorité des effets indésirables rapportés viendraient donc d’un effet «nocebo»,un effet placebo négatif.

Cet effet nocebo, calculé par les auteurs, c’est-à-dire la proportion de symptômes induits par la prise de statine mais aussi par la prise du placebo, était de 90 %. L’apparition de symptômes a très vite diminué entre les phases de prise de placebo ou statines et celles ou les participants ne prenaient rien. Les scores ont baissé de plus de moitié dans les trois jours suivant l’arrêt des comprimés dans 55 % des cas, que le comprimé soit ou non une statine.

Six mois après l’étude, 30 des 60participants (50 %) avaient recommencé à prendre un traitement à base de statines. Chez les autres, 18ont exprimé un refus en raison des effets secondaires, quatre ont vu une amélioration de leur cholestérol, un autre a été diagnostiqué d’une maladie neurodégénérative et un dernier s’est considéré comme étant « trop vieux ».

Chez les 30 participants reprenant un traitement, dix avaient interrompu partiellement leur traitement au cours des 12mois d’étude en raison d’effets secondaires.

S’il fallait chercher des limites à l’étude...

Dans la discussion, les chercheurs soulignent que ces effets secondaires pouvaient résulter de la prise de statines mais qu’ils étaient majoritairement liés à «la prise d’un comprimé, avec ou sans statine».Ils précisent que 26 des 60patients ont arrêté pendant la prise de statine, mais que 23 personnes sur 60ont aussi fait une pause avec un placebo avant la fin du traitement mensuel. De plus, plusieurs participants n’ont pratiquement ressenti aucun effet indésirable au cours de l’essai, alors qu’ils en avaient eus lors d’une précédente expérience médicale, relèvent-ils.

L’une des limites notées par les chercheurs est l’utilisation dans leur étude d’une seule statine au mêmedosage.

fb

JACC 2021 Sep 12; 78: 1210-1222