25 nov. 2021Mammographie

Une occasion de détecter un risque cardiovasculaire

La mammographie réalisée dans un but de dépistage du cancer du sein pourrait aussi permettre, en recherchant les calcifications dans les artères mammaires, de dépister des femmes à risque de maladie cardiovasculaire, ont estimé des spécialistes lors des Journées Françaises de Radiologie (JFR).

Un médecin regarde des images de mammographie
iStock/praetorianphoto

Bien que les femmes soient en général considérées comme étant à moindre risque cardiovasculaire que les hommes, les maladies cardiovasculaires sont en réalité devenues la première cause de mortalité, avec une augmentation de la prévalence de ces maladies, chez les femmes d’âge moyen en raison de l’augmentation de certains facteurs de risque, a rappelé Stéphane Manzo-Silberman, hôpital Lariboisière, Paris.

De plus, le niveau de risque cardiovasculaire est mal évalué chez les femmes car les scores de risque existants, fondés principalement sur les facteurs de risque classiques que sont notamment la pression artérielle et la cholestérolémie, l’ont été à partir de l’observation de cohortes principalement masculines. Ainsi, pour un même niveau de risque estimé à partir du score de Framingham, le risque réel d’événement cardiovasculaire est supérieur chez les femmes. Et 20 % des événements coronariens surviennent chez des femmes sans facteurs de risque classique.

Ces scores de risque devraient être affinés par l’intégration d’autres éléments comme l’hémoglobine glyquée, le taux de protéine C-réactive, les facteurs hormonaux (dont les traitements contraceptifs, hormonosubstitutif, etc.)

Un autre moyen d’améliorer l’évaluation du risque cardiovasculaire des femmes serait de mesurer le niveau de calcification des artères coronaires, qui est associé à l’athérosclérose et est corrélé au risque d’événement cardiovasculaire, en particulier chez les femmes. Cela peut être fait par un scanner cardiaque. Mais on ne peut pas faire passer un scanner cardiaque à toutes les femmes. En revanche, un grand nombre d’entre elles font régulièrement des mammographies de dépistage du cancer du sein. Or, la mammographie permet aussi de voir des artères mammaires, et donc si celles-ci présentent des calcifications.

Entre calcifications des artères mammaires et coronaires

Ces calcifications sont présentes dans 9 % à 29 % des mammographies selon les populations, a constaté ThuHaDao, hôpital Henri-Mondor, Créteil. Elles sont plus fréquentes chez les personnes âgéeshypertendues, en insuffisance rénale, diabétiques, etc. Des études dans d’autres pays ont montré une corrélation entre les calcifications des artères mammaires et le risque cardiovasculaire.

La spécialiste a présenté une étude réalisée dans cet établissement sur 507femmes qui ont passé à la fois une mammographie et une imagerie thoracique. Les chercheurs ont défini à la fois un score de calcification coronarienne et un score de calcification des artères mammaires, fondés sur le nombre de vaisseaux présentant une calcification et la portion du vaisseau qui est calcifiée. Dans cette cohorte– potentiellement biaisée par rapport à la population générale en raison du recrutement hospitalier, a fait remarquer la spécialiste– 22 % des femmes avaient des calcifications des artères mammaires. La proportion de femmes ayant des calcifications des artères coronaires était plus élevée, avec 45%.

Direction la consultation cardiologique...

Il n’y a donc pas de concordance totale entre les deux mesures, mais l’étude montre qu’un score élevé de calcification des artères mammaires a une spécificité de 95 % pour indiquer qu’il y a aussi des calcifications des artères coronaires, et donc un risque cardiovasculaire augmenté. Puisque la fréquence des calcifications des artères mammaires était deux fois plus faible que celle des artères coronaires, la sensibilité était nécessairement plus faible, avec 41 %. Mais cela montre qu’au moins une partie des patientes ayant des calcifications des artères coronaires pourraient être dépistées par la recherche de calcifications dans les artères mammaires à la mammographie, notamment chez les femmes jeunes ou d’âge moyen.

Cela suggère que les femmes ayant un score de calcification mammaire élevé pourraient être dirigées d’emblée vers une consultation cardiologique pour un bilan cardiovasculaire, a noté Thu Ha Dao. L’intérêt de cette stratégie devra toutefois être confirmé par des études prospectives.L’avenir pourrait aussi passer par la détection automatique des calcifications des artères mammaires par une intelligence artificielle, a-t-elle ajouté.

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