30 janv. 2024Douleurs abdominales basses liées à l'endométriose plus marquées avant l'âge de 24 ans

Endométriose à l’adolescence: oser un diagnostic clinique

Longtemps objet de déni par le corps médical, l’endométriose s’avère être une affection répandue. Elle touche en effet 10 % des femmes en âge de procréer – dont les jeunes filles à partir de la ménarche. Si l’anamnèse est claire, le diagnostic de suspicion d’endométriose doit être posé dès l’adolescence et un traitement doit être instauré, ont expliqué le Dr Sara Imboden, médecin-cheffe, PD, et le Dr Anja Wüest, médecin-cheffe, clinique universitaire de gynécologie, Berne, lors du symposium Gynea.

Nicht erkennbarer Gynäkologie erklärt einem jungen Mädchen den Menstruations-Zyklus
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La qualité de l’écoute et de l’information est à elle seule un aspect important de la prise en charge.

Une étude menée à l’Hôpital de l’Ile de Berne a montré que les douleurs du bas-ventre liées à l’endométriose sont généralement plus marquées avant l’âge de 24 ans qu’après (1).« Une dysménorrhée devrait donc déjà faire l’objet d’une anamnèse minutieuse chez les adolescentes et le cas échéant être traitée », a expliqué le Dr Imboden.

Le diagnostic peut désormais être clinique

Le diagnostic de l’endométriose ne nécessite plus nécessairement une laparoscopie. De nos jours, il est également possible de le poser cliniquement. « Lorsque les symptômes sont sans équivoque, qu’une jeune fille souffre de dysménorrhée sévère, qu’elle ne va pas à l’école pour cette raison et que les douleurs ne peuvent pas être contrôlées par les mesures habituelles, le diagnostic de suspicion d’endométriose peut et doit être posé », a souligné l’experte.

La plupart du temps, comprendre la cause de la douleur est déjà un soulagement pour les jeunes patientes. « Le diagnostic ne doit cependant pas faire passer pour pathologique ce qui ne l’est pas encore forcément », a expliqué l’intervenante. Une bonne information prend par conséquent toute son importance. Les jeunes filles doivent en effet savoir que l’endométriose n’est pas une affection grave en soi et qu’elle est en général aisément contrôlable. Ainsi, des jeunes filles de 14 ans ne doivent pas craindre de ne pas pouvoir avoir d’enfants, a souligné le Dr Imboden.

Proposer une thérapie hormonale si les antal-giques sont inefficaces

Si en cas de dysménorrhée, les antalgiques traditionnels sont inefficaces lorsqu’ils sont pris correctement dès le début des règles, un traitement hormonal peut être envisagé. Il est recommandé d’utiliser une contraception orale combinée (COC), un dispositif intra-utérin (DIU) au lévonorgestrel (LNG), un implant contenant de l’étonogestrel ou une pilule progestative seule (POP).

« En cas de dysménorrhée, la pilule est significativement plus efficace en cycle long que la prise selon le régime conventionnel avec des saignements de privation toutes les trois à quatre semaines », a expliqué le Dr Wyss. Le DIU LNG et l’implant ont montré une bonne efficacité en termes de régression de la douleur pour la dysménorrhée, la dyspareunie, la dyschézie et les douleurs chroniques du bas-ventre. En ce qui concerne la réduction de la douleur, l’efficacité du DIU est comparable à celle d’un agoniste de la GnRH.

Parmi les POP, on trouve sur le marché des préparations à base de drospirénone, de désogestrel et de diénogest, les POP à base de diénogest étant uniquement autorisées dans le traitement de l’endométriose. Les préparations progestatives en monothérapie par voie orale ont un effet direct sur la prolifération de l’endomètre par des mécanismes modificateurs et anti-inflammatoires.

Surveiller la densité osseuse

Le pic de masse osseuse (Peak Bone Mass) n’étant pas encore atteint à l’adolescence, les contraceptifs hormonaux (COC, POP) ne devront être prescrits qu’avec retenue au cours des trois premières années qui suivent la ménarche. Mais lorsque la dysménorrhée empêche une jeune fille d’aller à l’école et que les antalgiques sont inefficaces, un traitement hormonal peut bien entendu être entrepris, a expliqué le Dr Wyss. Il faut prescrire une pilule contenant au moins 30 µg d’éthinylestradiol car une dose plus faible peut empêcher d’atteindre la densité minérale osseuses maximale.

Chez des jeunes filles/femmes de 12 à 18 ans, une étude a montré que le diénogest en monothérapie a une très bonne efficacité en termes de réduction des douleurs et permet une nette amélioration de la qualité de vie, mais au prix d’une diminution de 1,2 % de la densité osseuse au niveau de la colonne lombaire à un an, a poursuivi l’intervenante. Cette perte était toutefois réversible chez la plupart des participantes six mois après la fin du traitement (2).

Pour la POP à base de drospirénone et de désogestrel, les études chez l’adulte n’ont pas mis en évidence de perte de densité osseuse. Les données correspondantes font défaut chez les adolescentes. « L’injection trimestrielle ne doit pas être utilisée à l’adolescence. Elle entraîne en effet une perte osseuse significative et en partie irréversible », a mis en garde l’intervenante.

Les agonistes de la GnRH ne sont indiqués qu’en deuxième intention chez les adolescentes. Ces médicaments ont non seulement un effet négatif sur la densité osseuse, mais peuvent également avoir des effets secondaires vasomoteurs importants et provoquer des flush cutanés(flare-up). À l’avenir, un antagoniste de la GnRH (p. ex. Relugolix) pourrait également être autorisée pour le traitement. Une préparation est déjà commercialisée aux États-Unis, mais elle n’est pour l’instant autorisée en Europe que pour le traitement des fibromes utérins. En cas d’échec du traitement conservateur, un traitement chirurgical est l’exception dans la prise en charge de l’adolescente même dans les cas sévères.