7 nov. 2025Frottis, mammographie, douleurs

Le suivi gynécologique des personnes trans

Il n’existe pratiquement pas de données ni de directives concernant le suivi gynécologique des personnes trans. Lors de la manifestation de formation continue Gynécologie Update Refresher organisée par le Forum pour la fomation médicale (FomF), le Dr Niklaus Flütsch s’est exprimé sur l’intérêt des frottis cervicaux et des mammographies de dépistage dans ce contexte et sur la manière dont les problèmes gynécologiques tels que les troubles hémorragiques et les douleurs abdominales sont examinés et traités chez les personnes trans. Le gynécologue suit plus de 500 personnes trans dans son cabinet à Zoug.

Portrait d'un homme transgenre sûr de lui
Jacob Lund/stock.adobe.com


« Le simple fait de se rendre dans un cabinet de gynécologie relève du défi pour les personnes trans », a déclaré l’intervenant.

Rendre la consultation plus accueillante pour les personnes trans

Un homme trans est par exemple soumis à un stress social lorsqu’il doit expliquer à l’accueil pour quelle raison il a besoin d’un examen gynécologique en tant qu’homme, prendre place en salle d’attente parmi des femmes, dont des femmes enceintes, et enfin s’installer sur le fauteuil gynécologique pour se soumettre à un examen avec spéculum.

« Un environnement trans-friendly peut déjà contribuer à dédramatiser la consultation gynécologique », a expliqué le Dr Flütsch. Il a recommandé de demander d’emblée à une personne qui n’apparaît pas clairement comme féminine ou masculine si elle souhaite être abordée en tant que femme, en tant qu’homme ou peut-être même de manière non binaire. Plus encore que d’habitude, il faut également de faire preuve de tact avec les mots utilisés. À noter aussi que certaines personnes trans préfèrent insérer elles-mêmes le spéculum.

Frottis PAP et dépistage du cancer du sein

En l’absence de directives sur le dépistage des personnes trans, faute de données, les recommandations générales en matière de dépistage doivent être adaptées à cette patientèle.
« Pour les personnes trans de sexe féminin à la naissance, qui n’ont pas de portio vaginalis et pas de col de l’utérus, il n’y a pas besoin de test PAP », a expliqué le Dr Flütsch. Un frottis n’a pas non plus beaucoup d’intérêt si le pénis est présent, mais qu’un homme trans n’a jamais de rapports sexuels vaginaux avec des hommes cis, qu’il est vierge ou qu’il vit de manière asexuée. Une alternative peut toutefois être proposée à ces patients :  un test HPV tous les 5 à 7 ans, sachant que les coûts ne sont pas pris en charge par les caisses.

Une mammographie de dépistage est utile chez les personnes trans à partir de 50 ans si les seins sont conservés. S’il ont été retirés dans le cadre d’une opération de réassignation sexuelle, il est recommandé de palper régulièrement la cage thoracique à la recherche de nodules. La raison en est que, lors d’une mastectomie, il reste toujours un peu de tissu glandulaire qui peut dégénérer.

Dépistage HPV et particularités anatomiques des néovagins

Les personnes trans de sexe masculin à la naissance n’ont pas de portio vaginalis après une opération de réassignation sexuelle et n’ont donc pas besoin d’un frottis. Toutefois, chez elles aussi, un test HPV peut être indiqué. En effet, pour la construction chirurgicale d’un vagin, on utilise généralement de la peau de pénis, un épithélium en plaques kératinisé qui protège bien contre une infection à HPV. Actuellement, il arrive aussi qu’on construise un néovagin avec de la muqueuse intestinale. « Comme les carcinomes anaux et rectaux peuvent être transmis par l’HPV, il est recommandé aux femmes transgenres sexuellement actives de faire un test HPV, voire un frottis anal », a expliqué le Dr Flütsch.

Le risque de cancer du sein est plus élevé chez les femmes trans sous traitement par œstradiol que chez les hommes cis, mais il reste inférieur à celui des femmes cis. La décision d’effectuer ou non une mammographie de dépistage devrait donc, selon l’intervenant, se fonder sur le risque individuel et le souhait de la femme trans.

Saignements et douleurs abdominales

Les troubles hémorragiques font partie des problèmes gynécologiques spécifiques les plus fréquents chez les personnes trans ayant un utérus. « Ils apparaissent surtout au début des traitements par la testostérone ou, plus rarement, plus tard, en relation avec une atrophie », a expliqué le spécialiste. Si des polypes, des myomes ou une hyperplasie sont exclus comme cause par l’échographie, ils peuvent être traités par une préparation progestative. Les saignements liés à l’atrophie seront traités comme chez les femmes cis par de l’œstriol vaginal, des probiotiques et des pommades de soin riches en lipides.

Chez les personnes trans, les douleurs abdominales ont rarement une cause organique. Le magnésium permet parfois de les soulager. Toutefois, en cas de troubles très importants, une hystérectomie peut être indiquée.

Chez les personnes trans de sexe masculin à la naissance, les saignements vaginaux sont généralement causés par des hypergranulations. Celles-ci apparaissent après l’intervention chirurgicale et peuvent être colonisées par des bactéries. « Si elles sont petites, elles peuvent être traitées facilement en les tamponnant avec du nitrate d’argent en cabinet gynécologique ou en demandant aux patients de faire des rinçages à domicile avec une solution désinfectante », a expliqué le Dr Flütsch. Les hypergranulations plus importantes doivent éventuellement être excisées chirurgicalement sous anesthésie. Des rinçages désinfectants et des suppositoires peuvent également être utiles de temps à autre en cas d’inflammation du néovagin.

La mesure du PSA n’est pas pertinente

Chez les femmes trans, les sténoses vaginales ne sont pas si rares que cela. « Elles apparaissent parce que le néovagin a tendance à se rétrécir », a expliqué le Dr Flütsch. Ces rétrécissements peuvent provoquer des dyspareunies ou empêcher les rapports sexuels. C’est la raison pour laquelle les femmes trans reçoivent de manière standard des dilatateurs à utiliser chez elles pour dilater régulièrement les zones rétrécies. Un autre problème est la prostate. Elle n’est pas retirée lors d’une opération de réassignation sexuelle et devra donc être palpée ou évaluée par échographie dans le cadre des examens préventifs. La mesure du PSA n’est pas pertinente chez les femmes trans. « Une mesure de la densité osseuse de base est toutefois utile », a souligné le Dr Flütsch. Elle devrait être effectuée pour la première fois sept à dix ans après une opération de réassignation sexuelle.