Diabète et fibrose pulmonaire idiopathique : un overlap thérapeutique bénéfique
Le diabète est associé à un risque nettement plus élevé de fibrose pulmonaire idiopathique (FPI). Si la raison de ce phénomène n’est pas clairement établie, la prise en charge d’une de ces maladies peut avoir des effets bénéfiques sur l’évolution de l’autre.

On estime que 20 à 50 % de la population de 50 ans et plus a une maladie chronique.
Les diabétiques sont les plus concernés. Ces patients développent en effet souvent des maladies pulmonaires telles qu’un asthme, une BPCO, des pneumonies et notamment une fibrose pulmonaire idiopathique (FPI).
Les atteintes vasculaires liées au diabète, telles que le dysfonctionnement endothélial, le remodelage et la diminution de la réactivité vasculaire pulmonaire, en sont généralement la cause, rappellent le Dr Ugochukwu Ebubechukwu et le Pr Patrick Geraghty, SUNY Downstate Medical Center, New York, dans un éditorial de la revue spécialisée Thorax (1).
Ils classent par ailleurs les résultats d’études qui mettent en lumière l’interaction entre le diabète et la FPI ou son traitement.
Le paradoxe de l’obésité
Contre toute attente, une étude n’a pas permis d’établir un lien causal entre le diabète de type 1 ou de type 2 et la FPI. Ni le taux d’HbA1c, ni l’insuline à jeun n’influençaient la maladie pulmonaire. Les auteurs supposent que la survenue concomitante du diabète et de la FPI pourrait plutôt être due à des facteurs de risque communs (p. ex. l’obésité).
Une étude (2) a établi une association entre l’indice de masse corporelle (IMC) et la survenue de la FPI, mais cette association n’a pas été confirmée pour les diabétiques de type 2 après une analyse par randomisation mendélienne multivariée. D’autres études ont fourni des résultats parfois contradictoires sur ce point.
D’autre part, des recherches suggèrent qu’un IMC plus élevé a un effet bénéfique sur l’espérance de vie en cas de FPI. Une étude sur 11 826 patients ayant une FPI montre des taux de mortalité et d’hospitalisations plus bas chez les participants en surpoids que chez ceux en sous-poids (3).
Ce paradoxe dit de l’obésité, selon lequel les patients ayant un IMC plus élevé auraient un meilleur pronostic, s’observe dans différentes maladies. Cependant, le sujet fait controverse et peut ne pas refléter de manière optimale les résultats cliniques à long terme, commentent les auteurs.
En cas de diabète et de FPI comorbides, le traitement de l’une des maladies peut avoir des effets bénéfiques sur l’autre. Une étude a p. ex. évalué les bénéfices cliniques d’un traitement par metformine chez des patients ayant une FPI et un diabète de type 2.
Elle a montré une baisse de la mortalité globale ainsi que du nombre d’hospitalisations sous metformine. Un autre travail a montré que le nintédanib, un antifibrosant indiqué dans la FPI, est bien toléré en combinaison à la metformine dans ce groupe de patients comorbides.
Un sensibilisateur à l’insuline contre la fibrose due à la chimiothérapie
Il a été montré que la pioglitazone, un sensibilisateur oral à l’insuline utilisé dans le diabète de type 2, prévient la fibrose pulmonaire induite par la bléomycine, ce qui pourrait être dû à son effet anti-inflammatoire. Cependant, le risque accru d’événements indésirables tels que la prise de poids et l’insuffisance cardiaque congestive limite l’utilisation de la pioglitazone.
Les médicaments indiqués dans la FPI peuvent également avoir un effet bénéfique sur les complications du diabète. Dans une étude randomisée et contrôlée en double insu, la pirfénidone associée au disulfure de diallyle modifié a permis une meilleure cicatrisation des plaies dans le syndrome du pied diabétique. Certains indices laissent en outre penser que la pirfénidone a le potentiel de stopper la diminution de la fonction rénale en cas de néphropathie diabétique.
Les deux auteurs de l’éditorial suggèrent que les futures études ne tiennent pas seulement compte de critères tels que l’HbA1c, l’insuline à jeun et l’IMC. Selon eux, il serait important d’inclure entre autres des facteurs environnementaux et de tenir compte des différents sous-types de FPI. Cela pourrait permettre de mieux comprendre les liens potentiels entre les deux maladies.
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- Ebubechukwu U, Geraghty P. Genesis of concurrent diseases: do diabetes mellitus and idiopathic pulmonary fibrosis have a direct relationship? Thorax 2025; 80: 123-124; doi : 10.1136/thorax-2024-222754
- Moss ST et al. Assessing causal relationships between diabetes mellitus and idiopathic pulmonary fibrosis: a Mendelian randomisation study. Thorax 2025; 80: 133-139 ; doi : 10.1136/thorax-2024-221472
- Hee-Young Yoon et al., Sci Rep 2024; 14: 11921 ; doi : 10.1038/s41598-024-62572-4