Xanthomes éruptifs révélés par un phénomène de Köbner sur tatouage
La présence de papules et de granulomes sur un tatouage peut être le signe d’un xanthome éruptif. En l’absence d’investigations plus poussées, des complications potentiellement mortelles peuvent survenir.

Un tatouage, auparavant plan, qui apparaît soudain en relief doit éveiller l’attention. Cette impression peut être due à la présence de petites papules dans la zone tatouée dans le cadre d’un phénomène de Köbner. Dans le cas présenté, le diagnostic correct a peut-être permis de sauver une vie.
Une femme de 29 ans a consulté en clinique dermatologique pour des papules prurigineuses, rapportent Connor Stonesifer et ses collègues, Université de Miami (1).
Papules diffuses et tatouages infiltrés : vers le diagnostic de xanthomes éruptifs
En l’espace de deux semaines, les nodules de couleur chair se sont étendus à partir des deux coudes aux zones cutanées grattées par la patiente. Il s’agissait du bras droit, de la main, du ventre, du dos et du creux poplité. Les corticoïdes topiques n’ont pas permis d’amélioration. L’aspect et la propagation des nodules doivent faire évoquer une histiocytose à cellules de Langerhans, un molluscum contagiosum ou un xanthome disséminé. Une histiocytose éruptive généralisée doit également être envisagée, écrivent les dermatologues.
En y regardant de plus près, les médecins ont également constaté la présence de nombreuses papules et indurations dans les quatre tatouages. La patiente s’était fait faire ces tatouages deux ans auparavant. Les biopsies de ces nodules ainsi que de ceux présents en peau non tatouée ont mis en évidence des granulomes avec des macrophages spumeux. Le diagnostic de xanthomes éruptifs a donc été posé sans équivoque.
Ces efflorescences étant typiques des troubles du métabolisme lipidique, les lipides ont été déterminés. En effet, le taux de triglycérides s’élevait à 4768 mg/dl (valeur normale : < 150 mg/dl). L’instauration immédiate d’un traitement par 43 mg/j de fénofibrate et 10 mg/j de simvastatine, associé à une alimentation végétarienne, a permis une disparition complète des papules et du prurit en l’espace de cinq semaines.
Des taux de triglycérides aussi élevés s’observent en cas de déficit familial en lipoprotéine lipase et de syndrome de chylomicronémie familiale (SCF). En outre, des facteurs polygéniques et secondaires tels que le diabète, l’obésité, un trouble nutritionnel et l’abus d’alcool peuvent être à l’origine de cette atteinte.
Une palette de couleur allant du jaune au rouge
En l’absence de traitement, il faut s’attendre à des complications sévères et potentiellement létales, telles qu’une pancréatite. Les xanthomes sont en général jaunâtres, mais la gamme de couleurs possibles va du jaune-orangé au rouge en passant par le rose.
Ils apparaissent rarement dans le cadre d’un phénomène de Köbner, c’est-à-dire dans une zone d’irritation cutanée. À ce jour, seuls trois cas de ce type ont été décrits en rapport avec un tatouage. La date à laquelle le tatouage a été réalisé ne semble pas jouer de rôle. En tout état de cause, les papules survenant dans le cadre d’un phénomène de Köbner doivent également être prises en compte dans le diagnostic différentiel des xanthomes éruptifs.
- Stonesifer C et al. Eruptive Xanthomata Manifesting in Tattoos. JEADV Clinical Practice 2024; doi: 10.1002/jvc2.594