PTSD complexe : penser le traumatisme autrement
Outre le trouble de stress post-traumatique, l’ICD-11 va également introduire le diagnostic de « PTSD complexe ». En quoi ces deux troubles se distinguent-ils et quelles sont les thérapies appropriées à chacune de ces pathologies ?

La CIM-11 regroupe les connaissances les plus récentes, a souligné le Pr Andreas Maercker, Institut de psychologie, Université de Zurich.
Cela vaut également pour les maladies psychiques liées à des événements stressants ou traumatisants. Outre le trouble d’adaptation et le trouble de deuil persistant, il s’agit notamment du trouble de stress post-traumatique (PTSD) et du PTSD complexe, nouvellement introduit.
Les critères diagnostiques du PTSD selon la CIM-11
Le PTSD « classique » est défini par ces trois aspects :
- critère de traumatisme : expérience(s) avec menace de mort ou de blessure grave ;
- symptomatologie présente depuis environ au moins un mois) et
- limitations fonctionnelles psychosociales.
Le diagnostic repose sur la symptomatologie et non sur la nature du traumatisme, a souligné le Pr Maercker. La CIM-11 énumère trois aspects de ce dernier, à savoir la réminiscence, l’évitement et le sentiment de menace.
Le symptôme de la réminiscence a été davantage précisé. Le fait de repenser avec tristesse à la situation traumatisante n’a jamais été un critère sensible, a souligné l’expert, mais fait parfois partie de la résilience. La CIM-11 exige donc une réminiscence sous forme de flashbacks, de cauchemars ou de souvenirs vifs et intrusifs.
Un black-out ou une dissociation ne sont pas présupposés
Dans le nouveau système diagnostique, l’amnésie ou l’amnésie partielle est remplacée par l’évitement (conscient) de pensées, de sentiments, d’activités ou de personnes en rapport avec l’expérience traumatique. Un black-out ou une dissociation ne sont pas exigés.
Au lieu d’un hyperéveil relativement peu spécifique, c’est maintenant un sentiment de menace persistant qui est cité comme typique. Celui-ci se traduit par exemple par une vigilance excessive ou une nervosité.
Chevauchement possible avec le trouble borderline
Dans le cas du PTSD complexe, un trouble de l’auto-organisation vient s’ajouter au tableau symptomatique connu. Il existe entre autres des troubles de régulation des affects, un concept de soi négatif et des difficultés dans les relations sociales.
Le traumatisme à l’origine de ce trouble est typiquement de longue durée ou de nature répétitive et/ou extrêmement menaçant et choquant, sans possibilité de fuite. On peut citer p. ex. l’emprisonnement dans un camp de concentration, la torture et l’abus sexuel d’enfants. Cependant, même pour le PTSD complexe, l’intervenant a souligné que la nature du traumatisme ne joue finalement aucun rôle dans le diagnostic, mais que c’est le tableau symptomatique avec le trouble de l’auto-organisation qui est déterminant.
Le trouble de stress post-traumatique complexe peut présenter des recoupements avec le trouble borderline. Différents critères contribuent à distinguer les deux diagnostics (voir tableau).
Distinguer le trouble borderline du PTSD complexe
Critère | Trouble de la personnalité borderline | PTSD complexe |
Expérience de traumatisme | non requis | doit être présent |
Peur de l’abandon | est une caractéristique | n’est pas une caractéristique |
Perception de soi | identité personnelle fluctuante | image de soi négative persistante |
Comportement d’automutilation | fréquent | possible, mais moins fréquent |
Comportement relationnel | relations instables | Éviter les relations |
La psychothérapie est généralement très efficace sur les symptômes d’un traumatisme, a rapporté la Pr Regina Steil, Centre de psychothérapie, Université de Francfort-sur-le-Main. Elle est le traitement de référence et est supérieure à la pharmacothérapie. Selon une méta-analyse en réseau, la thérapie cognitivo-comportementale axée sur le traumatisme (TCC-T), l’Eye Movement Desensitization and Reprocessing (EMDR) ainsi que la thérapie comportementale non axée sur le traumatisme sont particulièrement efficaces. La thérapie d’exposition narrative a également obtenu une intensité d’effet élevée par rapport à l’absence de thérapie.
Les données à long terme sont toutefois rares et ne suggèrent des effets significatifs à long terme que pour la TCC et l’EMDR. En conséquence, un concept d’exposition prolongée a été développé pour améliorer l’accoutumance aux intrusions et aux émotions qui y sont associées. Cette méthode est facile à apprendre, bien établie et très efficace dans les études, a souligné la spécialiste. Elle peut également être effectuée sous forme de traitement intensif de deux semaines et, sous cette forme, elle est associée à des taux d’abandon plus faibles.
Peu de preuves pour le traitement du PTSD complexe
Les preuves de l’efficacité de ces psychothérapies ainsi que d’autres types de psychothérapies en cas de trouble de stress post-traumatique complexe sont rares. Les directives sont actuellement en cours de révision. Dans la version de 2019, une combinaison de techniques axées sur le traumatisme a été recommandée pour la thérapie du PTSD complexe. L’accent devrait être mis sur le traitement du souvenir des expériences traumatiques et/ou de leur signification, ainsi que sur les techniques de régulation des émotions et d’amélioration des relations.
Les bienfaits de l’aérobie
Récemment, il a été décrit que l’effet d’une thérapie cognitivo-comportementale axée sur le traumatisme en cas de PTSD pouvait être augmenté par un entraînement à l’exercice aérobie. Des exercices aérobies de dix minutes ont été intégrés à neuf séances de TCC ou, dans le groupe de contrôle, un stretching de dix minutes. Au bout de six mois, la sévérité du PTSD, mesurée à l’aide de l’échelle CAPS-2 (Clinician-Administered PTSD Scale), avait diminué de manière significativement plus importante dans le groupe pratiquant des exercices aérobies que dans le groupe pratiquant des étirements. Des études sur des sujets sains et sur des modèles animaux suggèrent que l’entraînement physique module les processus d’apprentissage liés à l’extinction, a expliqué le Pr Steil.
Congrès de la Société allemande de psychiatrie et de psychothérapie, de psychosomatique et de neurologie