2 oct. 2024Mieux reconnaître les symptômes pour une approche efficace

Syndrome d’épuisement professionnel (burn-out) : Défis du diagnostic et de la prévention

Il n’y a pas à proprement parler de définition unique du syndrome d’épuisement professionnel (burn-out), qui ne constitue pas un diagnostic psychiatrique en soi. Ce syndrome est plutôt fondé sur des recoupements, notamment des troubles dépressifs, anxieux et liés au stress, mais aussi le syndrome de fatigue chronique. Qu’est-ce que cela signifie pour la pratique clinique ?

Illustration d'un homme soutenant de ses deux bras une pile surdimensionnée et presque vide.
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Inadéquation entre ce que les gens sont et ce qu’ils doivent faire, l’épuisement professionnel est un syndrome tridimentionnel

En l’absence de définition et d’outils de mesure standard, des chiffres robustes sur la fréquence du syndrome d’épuisement professionnel font défauts, rapportent Martin Kramuschke, psychologue, hôpitaux universitaires de Leipzig, et ses collègues (1).

Des chiffres difficiles à évaluer en l’absence de mesures standard

Une enquête représentative menée dans le cadre d’une étude sur la santé des adultes en Allemagne a permis de montrer une prévalence vie entière de la maladie de 4,2 % et une prévalence sur un an de 1,5 %. Les femmes étaient plus souvent concernées que les hommes.

Dans la CIM-10 actuellement en vigueur, l’épuisement professionnel est répertorié comme un état d’épuisement total sans être défini plus en détail.

Avec l’entrée en vigueur de la CIM-11, le burn-out a été retenu comme diagnostic qualifiant. Cependant, le syndrome n’a été classé que dans une catégorie complémentaire et non comme trouble psychique – il n’est donc toujours pas un diagnostic psychiatrique ou somatique à part entière.

Outils d’évaluation cliniquement pertinents pour la détection d’une symptomatologie de burn-out

Les auteurs soulignent que le Maslach Burnout Inventory test (MBI) et les BurnOut-Screening-Scales (BOSS) I-III sont des outils d’évaluation précieux. Il existe en outre des outils d’évaluation du burn-out pour des groupes professionnels spécifiques tels que les employés des professions médicales et sociales ou les enseignants. Il n’existe cependant pas de référence absolue permettant d’évaluer avec précision le syndrome d’épuisement professionnel.

Épuisement, détachement et baisse de performance

Le burn-out est la conséquence d’un stress chronique au travail qui n’a pas pu être géré avec succès. Cet état est décrit par la triade de symptômes suivante :

  • sentiment d’épuisement ;
  • distance mentale croissante par rapport à son travail, sentiments négatifs, voire cynisme ;
  • baisse de l’efficacité et des performances professionnelles.

Il est à regretter que le syndrome d’épuisement professionnel se réfère exclusivement au contexte professionnel, et non pas également aux surcharges de travail à domicile, dans la garde des enfants ou dans les soins aux proches.

Sur le plan étiologique, on soupçonne des facteurs liés au travail, qui peuvent être divisés en facteurs d’influence quantitatifs et qualitatifs. Les premiers incluent

  • la quantité, la vitesse et le temps de travail alors que
  • les seconds se réfèrent notamment à la complexité des tâches,
  • l’absence de contrôle personnel sur le travail,
  • des tâches mal définies,
  • un encadrement déficient et
  • un manque de reconnaissance.

Des traits de caractère individuels tels que

  • une bonne estime de soi,
  • l’optimisme et
  • la résilience

peuvent protéger contre l’épuisement professionnel, alors que d’autres traits de caractère augmentent le risque, comme le neuroticisme ou la conviction d’un contrôle externe.

71 % des sujets souffrant de burn-out avaient aussi un trouble psychique

En présence d’un syndrome d’épuisement professionnel, de nombreux autres symptômes peuvent être observés et recoupés avec d’autres troubles psychiques.

Une étude représentative de la population a montré que 71 % des sujets atteints de burn-out présentaient également un trouble psychique, dont :

  • 59 % d’un trouble anxieux ;
  • 57 % d’un trouble affectif ;
  • 27 % d’un trouble somatoforme.

Selon les auteurs, la délimitation du diagnostic différentiel est un véritable défi en raison des recoupements symptomatiques, notamment avec les troubles dépressifs, les réactions de stress aiguës, le trouble de stress post-traumatique et les dyssomnies.

Selon les auteurs, cela peut également être lié à l’encéphalomyélite myalgique et au syndrome de fatigue chronique (ME/CFS) sous la forme du symptôme cardinal de l’épuisement, le ME/CFS étant toutefois considéré comme une maladie somatique.

Les maladies somatiques associées à l’épuisement professionnel comprennent

  • les maladies cardiovasculaires,
  • l’hyperlipidémie,
  • le diabète de type 2,
  • les troubles musculo-squelettiques,
  • les céphalées et
  • les problèmes gastro-intestinaux.

La plupart du temps, il faudra prévoir des entretiens avec l’employeur

L’intervention devra donc cibler d’une part l’amélioration des conditions de travail, p. ex. en redéfinissant les exigences professionnelles (prévention contextuelle), ce qui nécessitera des entretiens avec l’employeur.

D’autre part, il s’agit d’atténuer les symptômes, ce que permettront la psychoéducation, des méthodes cognitivo-comportementales et des techniques de gestion du stress. Une réinsertion accompagnée et progressive dans l’activité professionnelle est généralement recommandée.

Étant donné le risque que les bénéfices de l’intervention s’estompent au fil du temps et que les anciens schémas se reproduisent, les auteurs recommandent des sessions de rappel plus espacées dans le temps. Il n’existe pas de recommandations univoques pour le traitement pharmacologique du syndrome d’épuisement professionnel.

À parents cools, enfants cools

Selon une enquête conduite auprès de plus de 700 parents américains, plus d’un sur deux a déclaré éprouver un sentiment d’épuisement professionnel. Les auteurs de l’étude l’expliquent par des attentes excessives vis-à-vis de soi-même. Les parents veulent passer du temps avec leurs enfants sans pour autant négliger leur couple ou leur maison. En se mesurant et en se comparant constamment avec leur entourage et sous l’influence des messages véhiculés par les réseaux sociaux, les pères et les mères vivent sous une pression considérable.

En raison de leur perfectionnisme, les parents ne mettent pas seulement leur propre santé en danger mais également le bien-être de leurs enfants. Selon les résultats de l’étude, un stress plus important et un mode d’éducation strict engendrent plus de problèmes psychiques chez les enfants. Inversement, moins les activités familiales sont planifiées et plus les parents consacrent de temps à leurs enfants, plus l’anxiété, la dépression ou le TDAH sont rares.

Les auteurs recommandent d’abandonner l’idéal des parents parfaits – car force est de reconnaître que de tels parents n’existent pas. Si les mères et les pères prenaient davantage soin d’eux-mêmes et optaient pour une éducation positive, toute la famille se porterait mieux.

Sabine Mattes